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La conception en asynchrone

Avec le développement du télétravail, cela nous amène à nous demander s’il est possible de concevoir un projet en asynchrone. En quoi ces nouvelles formes de travail, contribuent à changer la pratique du design ?

Est-ce que le design peut se concevoir de manière asynchrone ?

Le designer et le travail en synchrone

Définition

Antonyme du mot « asynchrone », le terme « synchrone » définit des actions qui se produisent dans le même temps ou intervalles de temps. Appliqué au travail, cela désigne le fait que des personnes effectuent des tâches aux mêmes moments et se caractérisent par des échanges en temps réel. Concrètement, la plupart des personnes travaillent à des horaires dits « de bureaux » soient entre 9h et 18h. Elles font donc du « travail synchrone ».

C’est donc naturellement que les designers ont adoptés cette modalité de travail. Par exemple, s’ils sont salariés en étant présents dans les locaux de leur entreprises et s’ils sont entrepreneurs en adoptant le rythme de leurs clients. En quoi, cette approche est pratique pour les designers ?

Conception en synchrone

Il est certain que pour mener des immersions (ex : aller à la rencontre des usagers) ou des étapes de conception (ex : faciliter des ateliers de co-création ou prototyper un service) s’avéraient complexes à des horaires décalés, à moins que le sujet le permette. Ces moments se caractérisent par la nécessité de co-construire avec les acteurs du projet et de s’imprégner de leurs pratiques. Ainsi, le travail synchrone se révèle essentiel.

Cependant, la pandémie a favorisé l’essor du télétravail et par ce biais des nouvelles formes d’organisation du travail qui passent notamment par des outils collaboratifs et virtuels. Ces dernières offrent donc aux designers de nouvelles possibilités pour concevoir des projets en asynchrone.

Le designer et le travail en asynchrone

Définition

Pour s’opposer à cette vision du travail, l’appellation « asynchrone » à vue le jour. Elle désigne le fait d’effectuer des tâches à un autre rythme, en décalage avec les horaires de travail fixes.

Distinction avec le travail à distance

Il est intéressant de ne pas confondre le travail en asynchrone et le travail en distantiel. Travailler en dehors de son lieu de travail ne signifie pas, faire du travail « en horaires décalés ». Par exemple, si un employé en télétravail débute sa journée à 9h30 et la termine à 18h30, il effectue du travail synchrone. Cette distinction est importante, car le télétravail favorise le travail en asynchrone en permettant aux échanges et à la communication d’avoir lieu dans des temporalités différentes. Pour résumer, il faut percevoir le télétravail ou le travail à distance comme une étape intermédiaire entre le travail synchrone et asynchrone.

Bien-faits

Des études démontrent que le travail asynchrone permet plus de productivité, car il s’adapte aux rythmes naturels des êtres humains. Nous pouvons tous constatés que notre système biologique bien que similaire, n’est pas le même que le voisin. Certains aiment se lever tôt, tandis que d’autres préfèrent faire des grasses matinées. Si on fait un parallèle avec les designers, leur seuil de créativité n’est pas le même au fil de la journée. Quand certains dès l’aube, ont plein d’idées de logos, alors que d’autres tardent à se coucher, car le flow des idées est incessant.

Un autre avantage du travail en asynchrone est de permettre d’organiser ses journées plus librement, mais cela nécessite de l’autonomie et de la confiance de la part de la hiérarchie pour les salariés. C’est aussi un bon moyen de réduire le nombre de réunions, car les échanges se font via des canaux de communication asynchrone (ex : le chat, le mail…), mais aussi grâce à une organisation plus rigoureuse… On pourrait même parler ici de design d’organisation, car il vise à concevoir les modalités de gouvernance et de management d’entreprises, d’institutions publiques et d’associations.

Conception en asynchrone

Néanmoins, tous les métiers ne sont pas propices au travail en asynchrone comme les métiers du soin, certains secteurs du commerce ou d’autres qui ont besoin une grande réactivité. Comme nous avons pu le voir, quelques étapes du processus de design sont difficilement réalisables en asynchrone, mais d’autres aspects de cette pratique le sont comme l’analyse des éléments de l’immersion (enquête sur le terrain), la réalisation d’un livrable d’un atelier ou encore la modélisation d’un objet (réalisation d’un rendu 3D)…

Ces exemples semblent correspondre uniquement à des étapes qui concernent les moments où le designer travaille « seul », mais ce n’est pas nécessairement le cas. Prenons un cas concret : un designer après avoir facilité un atelier comment la synthèse, puis la mise en page du livrable de l’atelier. Ensuite, il transmet les éléments par mail à son collègue pour une relecture et que ce dernier puisse ajouter des compléments. Les deux designers échangent ensemble, sans nécessairement travailler au même moment. L’un des facteurs-clés est de disposer de moyens de communication asynchrone, d’avoir défini en amont le rôle et les missions de chacun.

Dans la précédente mise en situation, il était question d’une action concrète et précise avec un objectif facilement identifiable. Quand est-il lorsqu’on s’intéresse à l’intelligence collective menée en asynchrone ? Est-ce que le travail en asynchrone est applicable au brainstorming (remue-méninges) ?

Imaginons qu’une équipe souhaite menée un brainstorming (remue-méninges), généralement il va s’agir d’organiser une réunion ou un atelier. Cependant, si l’équipe travaille en asynchrone, ils vont procéder différemment. Par exemple, en utilisant un outil collaboratif avec un « mur virtuel » pour y ajouter des post-its chacun à leur tour et en réagissant aux idées des des autres. Cette approche permet non seulement aux personnes qui ont besoin de murir leur réflexion de pouvoir le faire et de stimuler la créativité grâce aux rebonds sur les propositions des autres. A noter, que certaines méthodes de facilitation de démarches participatives utilisent ce principe pour inviter les participants à imaginer des solutions individuellement, puis en s’appuyant sur les idées du collectif pour enrichir les propositions. C’est le cas par exemple, de la méthode de « Creative Problem Solving. »

Il existe aussi d’autres exemples d’outils de conception et de démarches que nous pourrions qualifier d’asynchrone, comme les « Cultural probes » ou « Design probes » (en français sondes culturelles) qui visent à mener une immersion asynchrone. Concrètement ils s’agit de recueillir les besoins d’un usager en le faisant participer à la démarche. Grâce à un outil ou un support (le design ou culturel probes) conçus par le designer, l’usager va s’auto-observer en prenant en note son comportement (par exemple les objets qu’ils touchent au quotidien – Every thing we touch).

Ils existent très certainement d’autres exemples de conception asynchrone. Mais à notre connaissance, elles ne s’appliquent pas à l’ensemble du processus de design.

Limites et pratique du designer

En effet, loin d’un modèle parfait, le « design en asynchrone » a ses limites. Comme nous avons pu le voir le design se caractérise par des étapes qui nécessitent un travail synchrone. Ces dernières varient aussi selon l’approche de design utilisée, ainsi que la posture du designer et sa relation à l’usager. Par exemple un designer qui mène des projets avec une approche de co-création avec les usagers, travaillera nécessairement plus de façon synchrone. En effet, le design participatif est une démarche qui vise à impliquer les usagers, les partenaires, les employés et les commanditaires du projet dans la conception. Le designer va donc les accompagner à chacune des étapes clés : immersion, idéation, développement, prototypage et livraison.

Vers un design asynchrone

Pour conclure, il est intéressant de se questionner sur l’influence des nouvelles organisations du travail, notamment du télétravail et du travail en asynchrone sur notre pratique du design. Beaucoup tendent à dire que le modèle asynchrone est l’avenir. Ce postulat semble intéressant, mais doit être nuancé dans le cas du designer, car sa pratique est hybride et évolutive. Pour le moment, les projets sont majoritairement construits en de façon synchrone. Pourtant, nous pensons que le designer doit se questionner et imaginer d’autres façons de pratiquer son métier. Peut-être tendrons nous vers un design asynchrone, une nouvelle façon de concevoir des projets en design ?

Et vous, pensez-vous que le design devrait tendre vers une conception en asynchrone ?

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